Les sampans se faufilent entre les fleurs encore imbibées de rosée. Photo : VOV
Pour ses adeptes, le thé n’est pas une boisson comme les autres. Ils n’en boivent pas, ils s’en délectent. Et dans leur sélection de thés parfumés, le thé au lotus occupe la première place. Pour eux, c’est de loin le thé plus élégant, et le plus cher aussi, résultat d’une fabrication sophistiquée. Il faut savoir que c’est à Hanoi que le meilleur des thés au lotus est produit.
Les lotus fleurissent entre fin mai et fin août. C’est la haute saison touristique et «productive» des villages bordant le lac de l’Ouest. À Quang Ba, Tây Hô et Nghi Tàm, le thé parfumé au lotus est en effet un savoir-faire transmis de génération en génération.
Les villageois commencent leur journée dès l’aube. Leurs barques se faufilent entre les fleurs encore imbibées de rosée. C’est avec une diligence extrême qu’ils les cueillent. Remplies, les barques rentrent rapidement, de façon à ce que les fleurs soient délivrées le plus tôt possible aux «parfumeurs» du village. Ceux-ci enlèvent les pétales et ne prennent que les stigmates, la partie blanche supérieure du pistil qu’ils mélangeront avec du thé. Mais attention! Pas n’importe quel thé. Il faut absolument que ce soit du thé de Tân Cuong, dans la province septentrionale de Thai Nguyên, insiste Nguyên Thi Dân qui est la parfumeuse de thé la plus chevronnée de Hanoi.
«Le thé doit être parfaitement sec. Un kilo de thé nécessite pas moins d’un millier de fleurs de lotus», précise-t-elle.
Les fleurs de lotus. Photo : VOV
Un millier de fleurs pour un kilo de thé! Toute la quintessence du lotus au bout des lèvres. Voilà pourquoi le thé au lotus ne doit pas être consommé de façon banale. Il mérite d’être dégusté en toute petite gorgée pour que sa chaleur pénètre doucement dans la bouche, laissant s’évaporer ce parfum si élégant et si apaisant.
«Le parfum du thé au lotus est un parfum presque irréel, parfaitement unique. On peut le comparer à la nature de la culture hanoienne, une culture sentimentaliste, intuitive, proche de la nature», commente l’écrivain Nguyên Truong Quy.
Malgré la diversification des boissons, le thé au lotus garde sa place dans le cœur des Hanoiens, et de plus de plus de jeunes s’y intéressent. Il y a quelques années, un génie a inventé une nouvelle méthode de fabrication du thé au lotus. C’est plus facile à faire, et le résultat peut être tout aussi intéressant. La méthode en question consiste à enfermer des feuilles de thé dans une fleur pas encore éclose, à laisser la fleur ainsi «farcie» dans un vase pendant une journée pour imbiber le thé de son parfum avant de la mettre dans le congélateur…
Photo : VOV
Le café «O kia Hanoi» de la cinéaste Nguyên Hoàng Diêp propose des cours de fabrication de thé au lotus suivant ce procédé.
«Enfants, nous connaissions une seule variété de lotus, le Bach Diêp du lac de l’Ouest. Sa particularité réside dans la taille de sa fleur, qui est plus grande que les autres variétés de lotus. Avant l’éclosion, elle ressemble à un cône suffisamment évidé à l’intérieur pour qu’on puisse y mettre des feuilles de thé. Aujourd’hui, j’apprends à mes jeunes clients la fabrication du thé au lotus Bach Diêp», dit Hoàng Diêp.
Évidemment, par rapport au thé fait maison que Hoàng Diêp apprend à ses clients, le thé au lotus fabriqué par les artisans du lac de l’Ouest est du haut de gamme. Il se conserve aussi beaucoup mieux. Mais à chacun ses adeptes. À Hanoi en particulier et au Vietnam en général, tradition et modernité font toujours très bon ménage.