Jeudi, 13/08/2020 08:38 (GMT+7)
La Russie a revendiqué mardi 11 août avoir développé le premier vaccin "efficace" contre le coronavirus, mais cette annonce a été jugée au mieux prématurée dans le reste du monde.
Photo diffusée le 6 août par le Fonds souverain russe du vaccin Spoutnik V, développé par l'Institut de recherches Gamaleya. Photo : AFP
"Ce matin, pour la première fois au monde, un vaccin contre le nouveau coronavirus a été enregistré", a déclaré le président russe Vladimir Poutine, ajoutant : "Je sais qu'il est assez efficace, qu'il donne une immunité durable".
Le président a même affirmé qu'une de ses filles s'était fait inoculer le vaccin, nommé "Spoutnik V" (V comme vaccin, ndlr), en référence au satellite soviétique, premier engin spatial mis en orbite.
Le fonds souverain russe impliqué dans le développement du vaccin a affirmé que le début de la production industrielle était prévue en septembre.
"Plus d'un milliard de doses" ont été pré-commandées par 20 pays étrangers, a soutenu son président, Kirill Dmitriev, précisant que la phase III des essais commençait mercredi 12 août.
"La sécurité des patients est la première des priorités"
Peu après la déclaration du Kremlin, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a réagi en appelant à la prudence, rappelant que la "pré-qualification" et l'homologation d'un vaccin passaient par des procédures "rigoureuses".
"Nous sommes en étroit contact avec les Russes et les discussions se poursuivent. La pré-qualification de tout vaccin passe par des procédés rigoureux", a pointé Tarik Jasarevic, le porte-parole de l'OMS.
"La pré-qualification comprend l'examen et l'évaluation de toutes les données de sécurité et d'efficacité requises recueillies lors d'essais cliniques", a-t-il rappelé, soulignant que le processus serait le même pour tout candidat vaccin.
À Berlin, le ministère allemand de la Santé ne s'est pas embarrassé de précautions oratoires et a émis des doutes sur "la qualité, l'efficacité et la sécurité" du "Spoutnik V".
"Il n'y a pas de données connues concernant la qualité, l'efficacité et la sécurité du vaccin russe", a déclaré une porte-parole du ministère, rappelant qu'au sein de l'Union européenne, "la sécurité des patients est la première des priorités".
Le ministère de la Santé russe affirme que son vaccin permet "de former une immunité longue", estimant qu'elle pouvait durer "deux ans". Problème : les données sur lesquelles reposent ces affirmations n'ont pas été publiées.
Pour la virologue française Marie-Paule Kieny, ancienne directrice générale adjointe à l'OMS, "cette déclaration est prématurée puisqu'on ne sait pas encore si ce vaccin (ou aucun autre) va protéger contre le COVID-19", ni "quelle sera la durée de l'immunité".
Des tests à grande échelle d'autres vaccins sont en cours dans d'autres pays. Ainsi l'Indonésie a commencé mardi 11 août à tester sur 1.600 volontaires un autre vaccin, déjà en phase III.
Le candidat vaccin chinois mis au point par le laboratoire Sinovac Biotech, appelé Coronavac, fait partie des rares vaccins à être dans cette phase, la dernière étape des essais cliniques avant l'homologation.
Ce vaccin est déjà actuellement testé sur 9.000 volontaires au Brésil, le deuxième pays le plus touché au monde par la pandémie de coronavirus après les États-Unis.
Malgré ces possibles avancées sur le front d'un vaccin, le virus continue sa progression dans le monde. Plus de 20 millions de cas ont été officiellement recensés dans le monde, dont plus de la moitié en Amérique, selon un comptage réalisé par l'AFP./.
AFP/CPV/CVN