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Le Premier ministre tchèque Petr Fiala (droite), la présidente de la CE Ursula Von der Leyen (gauche) et la présidente du Parlement européen Roberta Metsola, à Strasbourg, le 6 juillet. Photo: AFP |
Le texte controversé, présenté en janvier par la Commission, classifie comme "durables" certains investissements pour la production d'électricité dans des centrales nucléaires - qui n'émettent pas de CO2 - ou des centrales au gaz, à condition qu'elles mobilisent les technologies les plus avancées. Et, pour ces dernières, qu'elles permettent de fermer des centrales à charbon bien plus polluantes.
Cette classification (dite taxonomie) devrait aider à mobiliser des fonds privés dans ces projets. Elle s'inscrit dans l'objectif de neutralité carbone de l'Union européenne en 2050. Réunis en session plénière à Strasbourg, les eurodéputés ont rejeté une proposition de veto contre ce projet, à une majorité de 328 voix (278 pour, 33 abstentions).
La reconnaissance de la contribution du gaz et du nucléaire à la lutte contre le changement climatique, bien que fondée sur des rapports d'experts, a suscité l'indignation d'organisations écologistes qui dénoncent une opération de "greenwashing".
"Politique sale"
"C'est de la politique sale et un résultat scandaleux", a réagi Ariadna Rodrigo de Greenpeace, en annonçant que l'ONG saisirait, avec d'autres, la Cour de justice de l'UE, unique moyen désormais pour bloquer l'initiative. Les gouvernements autrichien et luxembourgeois s'étaient déjà prononcés en faveur d'une action en justice.
"Ni le gaz, ni le nucléaire ne sont durables", ont affirmé les Verts dans un communiqué, estimant que le label de l'UE, jusqu'ici réservé aux énergies renouvelables, avait perdu sa crédibilité. L'inclusion du gaz "va retarder la transition réellement durable, dont on a désespérément besoin, et renforcer la dépendance aux hydrocarbures russes", a dénoncé sur Twitter la militante suédoise Greta Thunberg, sans évoquer le nucléaire.
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Un gazoduc en Bulgarie. Photo: AFP
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Quelques dizaines de manifestants écologistes ont brandi des banderoles mardi 5 et mercredi 6 juillet devant le Parlement européen. Les eurodéputés se prononçaient sur une motion d'objection, adoptée le 14 juin par les commissions parlementaires Affaires économiques et Environnement, synonyme de veto contre le texte de l'exécutif européen. Soutenue massivement par la gauche, elle a été très largement rejetée à droite, même si le sujet a divisé les familles politiques.
"Conditions strictes"
"Les craintes ne sont pas justifiées. Le gaz et le nucléaire ne sont pas mis au même niveau que les renouvelables et des conditions strictes sont incluses", a souligné l'eurodéputé Pascal Canfin (Renew, libéral).
Le label "vert" à ces deux sources d'énergie a déjà reçu l'aval des États membres. Seuls huit pays, dont l'Allemagne, l'Autriche et le Luxembourg, ont exprimé leur opposition, loin de la "super-majorité" de vingt pays nécessaire pour bloquer le projet.
La taxonomie de l'UE "donne la priorité aux renouvelables et à l'efficacité énergétique", a rappelé la commissaire aux Services financiers Mairead McGuinness, venue défendre son texte à Strasbourg.
Elle assure cependant que les énergies renouvelables ne pourront pas à elles seules répondre à la demande croissante d'électricité en raison de leur production intermittente. D'où le besoin, au moins à titre transitoire, de favoriser aussi l'investissement dans des moyens stables et pilotables comme le gaz et le nucléaire.
Cette position est aussi celle de la France, qui veut relancer l'atome, et des pays d'Europe centrale comme la Pologne, qui doivent remplacer leurs centrales à charbon.
La taxonomie "est un levier essentiel pour investir dans (le nucléaire) une énergie décarbonée, indispensable pour notre avenir", a estimé François-Xavier Bellamy (PPE, droite), saluant une victoire de "la raison". La Commission européenne s'est réjouie du vote, affirmant qu'elle restait "déterminée à utiliser tous les outils disponibles pour éloigner (l'UE) des sources d'énergie à fortes émissions de carbone".
"Personne ne dit que le gaz et le nucléaire sont des énergies vertes, mais elles sont temporairement indispensables à la transition", a plaidé l'eurodéputé Gilles Boyer (Renew).